Yoram Hazony, Maître de Marion Maréchal Le Pen et de la Droite Kasher, par FX Rochette

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen
Voir notre article “Marion Maréchal Le Pen, une pintade au service du sionisme”

Marion Maréchal se rapproche d’un nationaliste israélien. L’ex-députée FN participera à un colloque à Rome début février en présence de Matteo Salvini et Viktor Orbán. Le politologue et théologien Yoram Hazony, créateur de la Fondation Edmund Burke à l’origine de l’événement, l’a invitée personnellement.

[Source :Nouvel Obs]:

Yoram Hazony, intellectuel ou commissaire politique ?

L’une des caractéristiques de la société postmoderne dans laquelle nous vivons (marquée par le cloisonnement paradoxal de plus en plus hermétique des groupes, des « tribus », l’univers numérique des réseaux sociaux consolidant les croyances et les opinions en vases clos au lieu d’optimiser leur circulation) est la disparition progressive de la mémoire sous toutes ses formes hormis celle servant à la domestication des peuples. Ainsi, un jeune ou un moins jeune d’aujourd’hui se formera politiquement ou croira se former politiquement en zappant sur différentes pages orientées présentes sur les réseaux sociaux, réseaux sociaux qui se multiplient et qui se spécialisent au nom de l’entre-soi et de la prévention face à la censure ainsi que par la peur du gendarme.

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen
Français d’extrême-droite, 2020

S’il est séduit par l’écologie, il trouvera mille liens qui disent tous la même chose en substance. S’il se découvre une âme de patriote, pareillement trouvera-t-il mille groupes, mille pages qui lui raconteront les mêmes choses, à quelques degrés près, sur Marine Le Pen, sur Trump, Robert Ménard, la robe chaussette de Marion, Philippot, Zemmour et les autres saucisses de Cnews.

Cette génération ne lit pas ; elle en est devenue incapable car elle est incapable de se concentrer sur un texte qui dépasse vingt lignes. Aussi reste-t-elle comme ses aînés naturellement séduite initialement par la forme du discours dans un premier temps, mais contrairement à la génération d’avant, elle n’a plus la volonté ni même l’idée de vérifier si la forme du discours, les slogans, les visuels, les symboles sont en phase avec le fond, avec les principes fondateurs ou si les acteurs mis en scène sont à la hauteur.

Auparavant, me semble-t-il, quand un petit gars à la mâchoire carrée montait une organisation ou un club de pensée, les jeunes patriotes intéressés par le discours préliminaire essayaient au moins de savoir sur quelle base doctrinale ce fondateur s’appuyait-il pour décrypter l’actualité, et évaluait plus ou moins le bon respect à la ligne, la doctrine, le projet politiques. Il fallait, encore, penser.

Il est vrai que le désastre du nationalisme, ses échecs successifs, l’effroyable vision de tant d’efforts inaboutis, la trahison de beaucoup, les impostures des grandes bouches, n’incitent pas les cervelles qui cliquent à la moindre chatouille à sacrifier une partie de leur temps à lire, chercher, réfléchir, vérifier.

Et pourtant, l’extrême tension vers la connaissance, le goût pour la vérité, est notre dernière chance, la seule solution pour émerger de cette fange du mensonge, l’unique moyen d’échapper au chant des sirènes de l’imposture.

En matière d’intelligence, la France doit être le pays le plus faisandé du monde, parce qu’il est le jouet des maçonneries les plus absurdes, parce qu’il est soumis via la République au règne de l’étranger, parce qu’il est instrumentalisé par des communautés qui se fichent éperdument de notre France mais qui s’intéressent à sa politique étrangère, à son armée, et à son aura à travers le monde pour leur bien propre.

Dramatique situation. Car plus le public désireux de solutions patriotiques croît, plus on l’abreuve de discours tordus, plus on l’abreuve de slogans, d’images, autant de bons points donnés à l’ennemi qui ne travaille que pour lui en suçant l’énergie des bonnes âmes enfermés dans la virtualité de leurs fantasmes.

Hier, un nationaliste convaincu, avide d’apprendre, qui avait la volonté de marcher droit, lisait Maurras et ses « Idées politiques », Enquête sur la Monarchie, lisait Bardèche, Drumont, parfois Bernanos, Barrès, Ploncard d’Assac, Salazar, Codreanu, Vaugeois, Valois, Coston, Cochin, Fustel de Coulange, Bainville, Léon Daudet, les grandes plumes catholiques, et pourquoi pas devant la menace d’une guerre qui n’est pas la nôtre, Louis Ferdinand Céline et ses œuvres de 37 et de 38.

Aujourd’hui, il écoute, les yeux embrumés, Zemmour et ses collègues, éponge en crâne. Cnews, la voix de son maître, Goldnadel, Elisabeth Levy et il s’imbibera encore des propos télécommandés de Pascal Praud. Avec tout ça, il se sentira rasséréné et convaincu qu’il a fait le tour du sujet en écoutant quotidiennement ces personnalités qu’il ne saurait soupçonner de malhonnêteté intellectuelle ou de duplicité, leurs bonnes bouilles pour certains, leurs mimiques, et leurs émotions hyperboliques témoignant, n’est-ce pas, de leur sincérité.

L’inculture, terreau de la duperie

Yoram Hazony Marion Maréchal Le PenBref, sa « culture » est faite, et sa cervelle toute reptilienne (n’emmagasinant finalement que des slogans disposés en mille-feuilles) est dorénavant prête à absorber et à digérer une vision du monde totalement artificielle ne servant que les intérêts d’une infime minorité. C’est ainsi que l’on fabrique de la chair à canon depuis la Révolution. Ce sont les authentiques nationalistes français qui ont mis en garde les jeunes patriotes exaltés contre les manipulations des « Gros », contre les grands discours de patriotisme invitant les âmes sensibles à crever pour des intérêts qui s’opposent finalement à angle droit à ceux de la France.

La Grande Guerre (que personne n’avait imaginée à son départ comme l’horreur exterminatrice qu’elle sera) avait fini de convaincre les nationalistes authentiques que les discours à la Déroulède cachaient de vilaines choses. Hier les nationalistes avaient su traduire les grandes envolées lyriques et patriotiques d’un Jean Zay exhortant Bitru à foncer désarmé contre l’Allemagne après avoir raillé quelques années auparavant la France. Aujourd’hui, rares sont ceux qui ont compris, simplement compris, la fonction d’un Eric Zemmour dans le champ médiatique. Mais Jean Zemmour et Eric Zay, c’est du pareil au même.

De Zemmour à Hazony, une histoire de Z

Las, les cervelles ont été travaillées et il est devenu impossible aux patriotes de remettre en question Zemmour et tout ce qu’il représente. Autant essayer de convaincre un petit enfant comblé un 25 décembre que le Père Noël ne veut pas son bien ! Les Zemmouriens ou les zemmouristes, impliqués dans le militantisme, comme n’importe quels militants se sentant investis dans une mouvance avec ses codes, ses associations, ses revues et magazines et en l’occurrence ses radios et ses chaînes de télévision, vont, pour une fraction d’entre eux, vouloir faire profession de leurs activités politiques ou obtenir des responsabilités au sein de cette mouvance qui ne manque pas d’argent ; ça suinte de partout. Le zemmourisme possède donc ses réseaux, ses épiceries, ses « intellectuels » s’en nourrissant, et les intellectuels qui le nourrissent. Les impétrants zemmouriens lisent les derniers pour devenir les premiers.

A côté d’Eric Zemmour, comme nous le disions, toute une galaxie se met en place dont les stars ont pour dénominateurs communs une volonté affichée de combattre l’Islam dans le monde entier (1,7 milliard d’individus) et, comme par hasard, un sionisme infaillible. Tous ces gens se veulent, se disent décomplexés à propos des sujets qui furent tabous ou politiquement incorrects il y a encore quelques années tels que le souverainisme, l’identité, le patriotisme cocorico !, l’immigration (mais on ne voit aucune amorce d’un projet de rémigration), la critique de l’Islam.

Yoram Hazony Marion Maréchal Le PenOn retrouve dans ce microcosme l’incontournable, l’inénarrable, l’inévitable, Gilles-William Goldnadel, incessamment bavard, ancien cadre du CRIF, animateur, journaliste, avocat, fumeur de cigares et aujourd’hui supporter numéro un de Marion Maréchal Le Pen. Un Goldnadel qui vient de préfacer la traduction française du dernier livre de l’ultra-sioniste religieux israélien Yoram Hazony,, intitulé Les Vertus du nationalisme. Un livre 100% sioniste publié par les éditions Jean-Cyrille Godefroy dans une collection dirigée par Pierre-Yves Rougeyron (voir le Blog “Pierre-Yves Rougeyron démasqué).

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen
Ze”ev Jabotinsky, fondateur du Parti Révisionniste sioniste, voir les articles de François-Xavier Rochette à son sujet

Avant d’ouvrir ce bouquin, nous nous attendions à lire la prose réactualisée d’un Jabotinsky et sur ce point, nous ne fûmes pas déçus ; c’est une apothéose, mais nous pensions qu’il était l’oeuvre d’un universitaire, d’un érudit, et qu’il nous proposerait moult références et des analyses profondes… Mais Yoram Hazony ne porte d’épaisses lunettes que pour jouer à l’intello. Rien de plus. Le livre reste cependant un trésor pour tous ceux désireux de décrypter les contorsions, les astuces, les ruses, les reptations, les mensonges, les truismes de l’ennemi. Nous y reviendrons prochainement ici tant il est phénoménal que l’on puisse en souriant comme Yoram nous prendre à ce point pour des buses.

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen

Dans la préface un peu bâclée écrite par le zébulon Goldnadel, on trouve presque le copier/coller d’un argument de Zeev Jabotinsky. Nous allons citer l’avocat sans frontière aux cheveux improbables pour élever le niveau :

« C’est ainsi que l’auteur des Vertus du nationalisme explique l’injuste différence de traitement entre le nationalisme européen (NDLA rejeté violemment) et le nationalisme arabe par le fait que les occidentaux considèrent, par une manière de racisme paternaliste qui ne dit pas son nom, les peuples non européens comme des enfants à qui l’on doit davantage pardonner (!) pour cause de défaut de maturité. Sans invalider cette explication, j’ai montré pour ma part que depuis que le pire crime de tous les temps modernes avait été commis par un Antéchrist blanc, il existait une sourde honte inconsciente en Europe de partager la même couleur de peau qu’Adolf Hitler. »

Nous avons tout de la grosse manip dans ces quelques lignes. Goldnadel comme Hazony à la suite de Jabotinsky nous dit tranquillement que l’Occident shoatisé est raciste parce qu’il ne vitrifie pas comme il se doit les nationalismes arabes ! L’occident a trop tardé pour pulvériser l’Irak, et surtout se montre-t-il infiniment pusillanime devant les Palestiniens qu’il faudrait complètement oublier. Trop d’instances occidentales les biberonneraient par paternalisme, in fine, par racisme. Incroyable discours. Tapez-les, dit-il, ne soyez pas racistes ! Hé oui, ces gens sont incapables de défendre leurs intérêts sans raconter n’importe quoi.  En fait, il serait normal que l’entité sioniste jouisse des soutiens de l’Occident (là il ne s’agirait pas d’antisémitisme ni de racisme) afin qu’elle puisse faire le grand ménage en son sein et autour d’elle.
P. 160, Yoram Hazony paraphrase, lui aussi, Jabotinsky :

« La domination écrasante d’une nationalité unique (comprendre ici la communauté juive) et cohérente, caractérisée par des liens puissants et indissolubles de loyauté mutuelle, est en réalité le seul fondement de la paix intérieure dans le cadre d’un Etat libre. Je ne veux pas dire que l’ensemble de la population doit être originaire d’une seule nationalité. Aucun pays ne fonctionne comme ceci sur terre. En outre, il n’y a aucune preuve qu’une telle homogénéité est nécessaire pour garantir la cohésion, la stabilité et la réussite de l’Etat. Nous avons plutôt besoin pour établir un Etat stable et libre d’une nation majoritaire (communauté majoritaire) dont la domination culturelle est entière et non discutable, et contre laquelle toute résistance semblerait futile. Une telle nation majoritaire (communauté majoritaire) est suffisamment forte pour ne pas redouter les défis que lui lanceraient les minorités nationales et pourrait ainsi leur concéder des droits et des libertés sans endommager l’intégrité interne de l’Etat. De manière similaire, les minorités nationales qui pourraient s’opposer à cette majorité nationale sont elles-mêmes rétives à l’idée d’entrer en confrontation puisqu’elles sont bien conscientes qu’elles ne peuvent gagner. »

C’est ça la vertu du nationalisme ? Une majorité qui maintient dans l’humiliation (grâce à des subsides internationaux), ad vitam aeternam, une importante minorité que l’on doit considérer comme pouilleuse et dangereuse mais qui est finalement nécessaire à l’homogénéité, à la solidarité, et au racisme de la majorité ? Une minorité menaçante mais généralement inactive : « Les minorités nationales qui pourraient s’opposer à cette majorité nationale sont elles-mêmes rétives à l’idée d’entrer en confrontation puisqu’elles sont bien conscientes qu’elles ne peuvent gagner ». Où l’on voit que Yoram Hazony théorise arbitrairement la situation de l’entité sioniste pour en faire une généralité et même un idéal-type parfait, la nation par excellence.

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen

Que des Goldnadel et autres zemmouriens subjugués par des slogans, des truismes et des sophismes recensent joyeusement ce livre en n’y voyant rien à redire, on le comprend, on a compris. Mais qu’un Michel Onfray, chantre de l’égalité et figure de proue de l’athéisme encense ce bouquin sur son site Front populaire en dit long, très long, sur l’évolution actuelle d’une mouvance qui ne s’est jamais autant mue. Si, encore, Hazony avait fait preuve de qualités intellectuelles ou avait exposé les fruits de recherches historiques novatrices, nous comprendrions que l’on puisse seulement en parler. Mais là a-t-on affaire à la comédie obséquieuse d’Onfray qui est indéniablement passé sous les fourches caudines de ses maîtres.

Yoram Hazony Marion Maréchal Le Pen

Nous savions déjà que Marion Maréchal avait fait allégeance à son commissaire politique Hazony qui organisa et présida il y a un an la convention européenne du « national conservatisme » en Italie, mais on sait aussi d’où vient la sylphide et qu’elle représente surtout « ceux qui ne lisent pas ». En revanche, un Michel Onfray qui ne partageait aucune idée du philosophe israélien il y a seulement deux ans, et qui est un grand lecteur, témoigne qu’il y a quelque chose qui ne tourne décidément pas rond dans le champ politique français.

François-Xavier Rochette.

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