Trump et le Grand Israël – FX Rochette

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Le judaïsme, pour les partisans du Grand Israël, n’est pas une valeur spirituelle, c’est une manifestation physique du pouvoir dans le monde. Ces israéliens comprennent que tous les juifs ne sont pas leurs «frères». Certains juifs sont trop effacés, trop libéraux, trop humains, trop universalistes. Ces Juifs sont les détritus qui seront emportés par le flot de l’histoire. Les nationalistes israéliens doivent remplacer ces alliés juifs traditionnels et l’ont fait, en trouvant de nouveaux : évangéliques chrétiens, dictateurs africains, néo-nazis européens.

Richard Silverstein.

La Guerre Economique menée par Trump aux partenaires des USA dont la France

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Même si Donald Trump est un professionnel génial de la communication et par ce talent diffuse de belles idées d’une manière décomplexée sur l’immigration, la famille, le patriotisme, la liberté, même s’il a nommé à la Cour suprême des personnalités considérées comme catholiques conservateurs (même s’il ne s’agissait que d’étiquettes, celles-ci les obligent à faire preuve de loyauté envers les convictions censées les animer) et s’il déclare s’opposer à la gouvernance mondiale et à ses plus grosses structures, il est curieux cependant que la mouvance dissidente, qui se réclame (ou se réclamait?) du patriotisme et de l’antisionisme dans une démarche holistique exemplaire, peut-être distraite, ne se soit intéressée de plus près ni à l’extraordinaire sionisme du grand blond ni aux conséquences pas toujours très positives de sa politique économique en France et ailleurs.

Il y aurait énormément de choses à dire sur l’interventionnisme économique de Trump qui nuit en particulier à la France, à la Russie et à l’Allemagne. Car derrière le patriotisme virulent d’un personnage haut-en-couleur, les décisions brutales, unilatérales et pis (car les grands acteurs économiques ne peuvent vivre avec cette incertitude permanente très longtemps) surprenantes, signées par Donald Trump, si elles nuisent dans l’immédiat aux pays victimes des sanctions américaines, pourraient bien se retourner contre les Etats-Unis. L’arme redoutable utilisée sans compter par Trump est celle du dollar et de l’extraterritorialité du droit américain.

Trump contre Edom

En somme, toute entité commerçant en dollars (et pour de nombreuses raisons, il est difficile de ne pas faire des affaires en dollars sur la scène internationale) doit respecter les sanctions décrétées par l’exécutif américain sous peine d’amendes astronomiques. Impossible d’y échapper. En fonction de considérations très relatives (et donc imprévisibles), afin de punir la cible, le président américain condamne directement le pays indocile (ici la Russie coupable de ses actions vraies ou supposées en Crimée, là la Turquie coupable d’emprisonner un Américain, ailleurs l’Iran parce que c’est l’Iran…) mais aussi, de fait, mais c’est bien volontaire, ses principaux partenaires commerciaux.

Ainsi, est-il exigé, mécaniquement via l’extraterritorialité du droit américain et de son « véhicule », le dollar, que tous les acteurs économiques de la cible participent à la sanction. Généralement, les Etats-Unis ne sont pas perdants n’étant pas les principaux partenaires économiques des pays visés. Les principales banques françaises ont été victimes de ce stratagème et ont du débourser des milliards de dollars avant de se désengager de partenariats commerciaux contractualisés. Il en fut de même pour Alcatel, Alsthom et d’autres.

Dernièrement la France a reçu un coup extrêmement dur, et c’est Donald Trump et son administration terriblement néo-con sous son cache-sexe populiste America First, qui l’ont donné. Un coup de maître, guère commenté par les media français complètement soumis à la puissance américano-sioniste. Un coup de maître puisqu’elle dégomme un concurrent mastodonte du secteur pétrolier, Total, tout en asphyxiant le principal ennemi d’Israël, l’Iran.

Devant les sanctions américaines contre Téhéran, Total et Peugeot (et bien d’autres entreprises françaises) ont tout bonnement pliés bagages. Une véritable fuite orchestrée par Trump et ses néo-cons, les multinationales françaises évitant des amendes qui auraient pu se chiffrer en milliards de dollars avant même que Peugeot n’ait pu exporter ses nouveaux véhicules et Total raffiner un nouveau galon d’or noir. Les Etats-Unis usent et abusent de leur domination (qui ne repose finalement que sur un toujours possible déchaînement de violence) jusqu’à faire tourner en bourrique les nations qui avaient toujours respecté les sanctions internationales et qui avaient cru sans danger le fait de réinvestir massivement en Iran suite aux Accords sur le nucléaire iranien autorisés par Barak ObamaTrump a tout simplement mis à la poubelle ces accords alors que l’Iran les avait respectés à la lettre en se débarrassant notamment de 97% de son plutonium.

Une guerre économique au service (aussi) du Grand Israël

Où l’on voit, qu’en plus de nuire à la crédibilité américaine sur la scène internationale en matière économique, il appuie de tout son poids la faction israélienne au pouvoir, celle travaillant sans relâche pour l’édification du Grand Israël (Make Great Israel). Familièrement, on appelle ça un strike. Européens et Iran frappés en un seul coup.

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Vladimir Ze’ev Jabotinsky, fasciste sioniste

Là arrive-t-on au sujet incontournable, à l’anomalie, d’abord à la question : le projet sioniste (celui de Jabotinsky voir l’article “Goldnadel, chef d’orchestre de la secte des mythomanes, ndlr”) n’est-il qu’une petite affaire, une question secondaire du trumpisme ou son principal moteur ?

Les patriotes faisant habituellement leur gorge chaude de l’antisionisme n’ont jamais commenté sérieusement le sionisme de l’administration Trump mais l’ont toujours glorifié pour tout et rien, même pour ses bons mots. Il est pourtant évident que les centaines de discours et écrits de Trump sur le fameux mur (jamais construit) américano-mexicain ont tous été applaudis dans le vent et servis de gargarisme aux groupies d’un homme alors que la réalité politique, la concrétisation de l’agenda sioniste, Trump debout sur la pédale d’accélération, se déroulait sous les yeux de tous.

L’ambassade américaine déplacée à Jérusalem ? Juste un symbole, un détail, alors que depuis bien longtemps Jérusalem Est devait, pour les autochtones qui espéraient encore, devenir la Capitale d’un futur Etat palestinien ? La reconnaissance américaine de l’autorité d’Israël sur le Golan ? Encore un détail, il faut bien sûr avoir de bonnes relations avec la communauté juive américaine (qui ne demande rien de tout cela, sauf sa fraction likoudnick, minoritaire) blablabla… Le massacre des Palestiniens passé sous silence par l’administration américaine en mai 2018 ? Où ça ? Comment ? Des Arabes ? Des Musulmans ?

Le 14 mai, apothéose sanglant au moment où dignitaires américains et israéliens buvaient leur Champagne dans la nouvelle ambassade rutilante sous les rires de vieilles rombières et de l’affreuse Madame Netanyahou. Peu de temps après, Trump retire le financement des Etats-Unis à l’agence onusienne de soutien aux réfugiés palestiniens et expulse la représentation de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) à Washington. En novembre 2019, l’administration Trump annonce reconnaître la « légalité » des colonies israéliennes en dépit du droit international. Sous l’égide de Trump, car c’est bien d’un bouclier ricain dont il s’agit, le nombre de logements israéliens construits dans les territoires palestiniens occupés a augmenté de 90%. Le 27 janvier 2020, Trump impose un plan de paix aux Palestiniens qui ressemblent à une véritable déclaration de guerre qui fit sourire jusqu’à la crampe mandibulaire Benjamin Netanyahou. Un plan de paix grotesque puisqu’il n’accorde rien à un Etat palestinien qui devient tout simplement fantomatique dans son texte. Ni armée, ni véritable capitale, ni un territoire géographiquement cohérent, rien. Ce plan de paix est littéralement un plan d’euthanasie de la cause palestinienne. Pourquoi, mais pourquoi, la mouvance antisioniste dite dissidente ne dénonce-t-elle pas à cor et à cri ce génocide ?

Au-delà de la Palestine…

Nous pourrions nous moquer du sort de la Palestine ? Non, seuls les imbéciles peuvent éluder ce qu’il se passe au Proche-Orient autour des menées sionistes. Le silence des antisionistes officieux de notre petit milieu nous fait penser au charlatan qui casse le thermomètre pour ne point voir la température qui monte, qui monte. Le projet sioniste sous la houlette des thuriféraires du Grand Israël (Eretz Israel Hashlema) ne se limite pas à la liquidation de l’opposition palestinienne.

Le Grand Israël est le projet sioniste voulu par les héritiers de Jabotinsky et de son Parti révisionniste et par une très importante minorité sectaire états-unienne. Evangélistes (qui croulent sous les dons et les gros cadeaux d’Israël), Témoins de Jéhova, Mormons, et on en oublie. Tous sont les partisans exaltés (ou intéressés) du Grand Israël, la « Seconde venue » (de Jésus) ne pouvant avoir lieu qu’après sa totale création selon leur exégèse biblique.

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Outre l’ensemble des territoires palestiniens, le Grand Israël devra occuper la Jordanie, la Syrie, les trois quarts de l’Irak, le tiers de l’Arabie saoudite (jusqu’à Médine) et la moitié du désert du Sinaï jusqu’au Nil. Du Nil jusqu’à l’Euphrate. Il ne s’agit pas d’un projet chimérique mais d’un plan patiemment appliqué. Mais tout semble s’accélérer depuis 4 ans avec l’explosion des espoirs nationalitaristes palestiniens et l’isolement de l’Iran notamment, seule puissance régionale capable de tenir tête à Israël.

Où l’on voit que le « non interventionnisme » d’un Trump sert l’agenda du parti du Grand Israël. En 1923, Jabotinsky publie un texte fondamental dans la structuration de sa pensée : la « Muraille d’acier ». Dans ce texte, Jabotinsky critique la démarche du courant sioniste majoritaire, et entend promouvoir une politique alternative en Palestine. Le cœur de sa réflexion est la résistance arabe au sionisme, qui pour lui ne pourra que s’amplifier avec la colonisation juive. Le sionisme devra donc s’imposer grâce à une « Muraille d’acier », une armée juive. On retrouve ici le thème de la légion juive (dont les deux principaux acteurs furent Jabotinsky et un certain Trumpeldor), qui est au cœur de l’analyse politique de Jabotinsky : le sionisme devra s’imposer par la force.

« Autrement dit, écrit Jabotinsky, le seul moyen d’obtenir un accord dans l’avenir, c’est de totalement renoncer à en obtenir un dans le présent ». Ne vivons pas actuellement la concrétisation de la politique de Jabotinsky au Proche-Orient ? Le plan de « paix » israélo-palestinien n’a-t-il pas été imposé sans l’accord des représentants palestiniens ? N’apparaît-il pas de plus en plus clairement que les massacres réguliers de Palestiniens et ces opérations d’humiliation d’un peuple qui se bat en premier lieu pour sa dignité ne servent qu’à faire mourir dans l’oeuf ne serait-ce que le début d’un projet d’accord ?

La tragédie libanaise, l’affaiblissement d’un pays dont la partition ethnique et religieuse a été appuyée par Israël, la situation pour le moins précaire de la Syrie (saignée à blanc), l’Irak irrémédiablement divisé, ne s’inscrivent-ils pas tous dans la feuille de route des partisans du Grand Israël ?

La guerre de l’eau

Quid de l’Egypte ? L’Egypte fait fréquemment le ménage à l’Est du pays, à l’Est du Nil où apparaissent régulièrement des groupes terroristes armés qui semblent travailler à sa déstabilisation. Mais la plus grande menace pour Le Caire est ailleurs. Paradoxalement loin de ses frontières, en Ethiopie. Là où Addis-Abeba achève la construction d’un barrage pharaonique sur le Nil bleu non seulement pour produire de l’énergie mais aussi pour détourner l’eau si précieuse dans cette région au profit de l’Ethiopie et du Soudan. L’Egypte, souffrant déjà d’une pénurie en eau, risque de ne pas pouvoir surmonter cet asséchement du Nil (L’Egypte tire du Nil 97% de son eau potable et de son irrigation). Or, qui trouve-t-on derrière la construction de ce barrage (produit en grosse partie par une entreprise italienne) ? Israël, qui aide financièrement l’Ethiopie mais aussi qui sanctuarise le « barrage de la renaissance » avec notamment un système de missiles anti-missiles tout autour de ce dernier. Israël est en somme garant de la sécurité éthiopienne et de ce barrage.

Mais que viendrait faire notre bon Trump dans cette affaire ? Rien… Ou presque. Trump qui passe pour un ami de l’Egypte d’Al-Sissi a déclaré, tout excité, le 24 octobre dernier dans un jeu de dupes où il n’y aura qu’un gagnant : “C’est une situation très dangereuse, car l’Égypte ne sera pas en mesure de vivre de cette façon”, a-t-il déclaré à des journalistes en marge d’une cérémonie dédiée à l’accord de normalisation des relations diplomatiques entre Israël et le Soudan. “Ils (les Égyptiens) finiront par faire sauter le barrage. Je le dis haut et fort : ils feront sauter ce barrage. Ils doivent faire quelque chose”.

Question : Donald Trump sera-t-il encore président des Etats-Unis quand la situation (le barrage n’est officiellement pas encore en voie de remplissage même si on constate une montée des eaux due à la saison des pluies) exigera du Caire une intervention physique sur ce barrage protégé par ses plus chers amis ? Appuiera-t-il l’Egypte contre le Grand Israël ? Permettez-nous d’en douter. Reste l’option de l’immobilisme égyptien qui condamnerait l’Egypte à vivre dans une perpétuelle détresse hydrique et ainsi dans une longue agonie.

François-Xavier Rochette.

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