Qui sont VRAIMENT les Black Blocs ? [FX Rochette]

Les Black Blocs, forces noires du Système. De Gaston Besson, la barbouze du Stay Behind, aux Gilets Jaunes

Article paru dans RIVAROL.

La force, la plus grande force de la démocratie est de ne pas en être une. Ironie cruelle qui reste inobservée par l’immense majorité des gens régulièrement excités par des élections de masse et des oppositions sexy, des rebelles en papier, des candidats primeurs, des hommes au visage porcelaine et aux yeux océan, des femmes patriotes comme on n’en a plus vu, dirait-on, depuis la seconde épouse de Léon Daudet, des protecteurs de la civilisation judéo-chrétienne, oui Monsieur ! La nièce de minus en robe chaussette levée contre les barbes homophobes pour mieux faire entrer les Prosper et les Casimirs qui ne trouveront jamais leur vitamine D sous nos latitudes et laisser la famille à cinq flèches gérer les choses comme elle l’entend.

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En démocratie, la nôtre, ce carnaval virtuel, il n’existe pas d’opposition à la fois véritable et respectée en tant que telle. Il existe des doublures, voilà tout, et l’opposition apparente est toute verbale. La démocratie sert à gérer les aspirations et les mécontentements de minorités sans cesse morcelées, sans cesse divisées pour qu’elles restent éternellement au stade foetal.

Oppositions contrôlées ou oppositions dirigées ?

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On parle à propos d’opposition contrôlée, mais il est évident que le meilleur moyen de la contrôler est de la diriger pour parler comme Lénine. Ce qui existe dans le champ politique, sur la scène où évoluent les candidats existent aussi dans l’univers militant non officiel, en dehors de l’échiquier représentatif. Sur Internet où de super dissidents toisent le Système et séduisent beaucoup d’âmes de feu pour les mener nulle part ou, plus fort, vers une idéologie ou une vision du monde qui n’étaient pas du tout la leur au commencement de leur engagement.

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Même le communisme c’était mieux avant !

On avait vu ces dernières décennies pour ne parler que de l’histoire contemporaine proche, un Parti communiste français passer d’une idéologie socialiste viriliste, stalinienne, et peu encline à relativiser ses critiques contre la grosse banque et même contre l’immigration-invasion perçue par un Georges Marchais comme un moyen pour les « possédants » de casser les salaires, d’affaiblir les syndicats et de rendre surréalistes les revendications ouvrières dans une société où le chômage explosait. L’énorme thèse d’histoire d’Yvan Gastaut sur « L’Histoire de l’immigration en France » (à charge puisqu’elle est toute faite pour condamner l’anti-immigrationnisme d’une manière générale) montre bien en filigrane, malgré son auteur, le processus d’anéantissement de la vieille gauche pourrie par le gauchisme sociétal, antiraciste, homosexualiste, cosmopolite, puis sa disparition grâce au jeu de Robert Hue, officiel communiste qui a fini, quand même, macroniste.

Ce nain menteur ! La droite nationale fut elle-même disposée à servir de réceptacle aux milieux populaires ulcérés par le nouveau discours « arc-en-ciel » de la gauche post-communiste. C’est ainsi que l’incontournable faiseur de néologismes, Pierre-André Taguieff, inventa le concept de gaucho-lepénisme (avant de sortir l’expression d’islamo-gauchisme, outil sioniste de destruction massive ; on anéantit plus sûrement des mouvances avec des étiquettes qu’avec des manches de pioche).

Une violence systémique

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Mais comme nous le disions, les entités apparemment les plus radicales, les plus violentes, les plus brutales, peuvent tout aussi bien être contrôlées et dirigées pour servir les intérêts de cette démocratie fantasmatique. L’actualité brûlante nous fournit une belle illustration avec ce qu’on appelle depuis une vingtaine d’années, systématiquement, les Black Blocs ou le Black bloc. Une bien étrange mouvance que l’on voyait surtout au début des années 2000 au sein de manifestations qui étaient organisées durant les grandes réunions des décideurs du monde entier qui se rassemblaient sous l’égide de l’OMC. A partir des années 2010, les bonhommes en noir ont de plus en plus investi les manifestations populaires où ils font preuve, depuis leur intronisation, de la même violence, irrationnellement.

C’est avec l’épisode des Gilets jaunes que la marée noire fit preuve de son redoutable pouvoir de nuisance. Car, en cassant, en brûlant, en agissant tous azimuts comme des barbares, en fracassant tout sur leur passage, les fameux Black Blocs effrayèrent une partie des Gilets Jaunes sincères qui ne pouvaient gérer dans le même temps violences policières et violences « urbaines », aussi une importante fraction de gens en colère se mit en retrait.

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Alors que l’engagement du peuple ne faiblissait pas, la « marque » Gilet Jaune fut soudainement entachée par des accusations d’antisémitisme saugrenues (l’immense majorité des Gilets Jaunes ne sait rien au sujet de la question juive, elle est ou était surtout farouchement anti-macronienne) et dans un second temps par la déferlante du terrifiant Black Bloc. Entre accusations d’antisémitisme qui font frémir le grand public et la violence sourde d’apparents fous furieux sombres comme la mort, le mouvement Gilets Jaunes a été pris en sandwich.

Le Black Bloc continue son travail de sape en gangrenant chaque manifestation susceptible de gêner le pouvoir. Les derniers rassemblements motivés par le projet de loi sur la « Sécurité globale » furent complètement parasités par les agissements de ces noirauds. A quoi servent-ils ? Sont-ils un gros bélier cassant le bouclier du pouvoir ? Ou un vieux bouc empuantissant les expressions de colère populaire ? La seconde hypothèse ne peut être que la bonne. Les conséquences de l’intervention des bourrins noirs étant exclusivement négatives pour les initiateurs des manifestations qui protestent contre l’arbitraire policier, l’impunité des forces de l’ordre, et cette menace de ne plus pouvoir filmer les arrestations en direct à cause du fameux article 24 de la loi Sécurité Globale. Conséquences négatives puisque le déchaînement de violence perpétré par le Black Bloc alimente au contraire dans les milieux consacrés au débat la question d’une répression toujours plus sévère contre les manifestants qui déraperaient d’une manière ou d’une autre.

Fantomatiques et impunis

Si tous les individus composant le Black Bloc ne sont pas des professionnels de la violence urbaine spectaculaire, nous pouvons qualifier ceux qui ne le sont pas, les amateurs de cette mouvance, d’idiots utiles de Big Brother. Quand un représentant syndical de la police nationale est interrogé sur les raisons pour lesquelles les Black Blocs ne sont jamais interpellés, s’ensuit toujours un moment de silence, puis un autre de balbutiements qui en disent long sur le rôle joué par ces casseurs B.B. Les réponses évoquées dans un bégaiement de malaise sont toujours surréalistes : « C’est trop dangereux » ; « ils courent trop vite » ; « il peut y avoir des victimes collatérales » ; « on ne les voit pas quand ils cassent » ; et parfois cet argument qui n’entraîne aucun signe de curiosité de l’intervieweur : « On a l’ordre de ne pas intervenir »…

Après toutes ces années de casse, de feu, la Justice n’a jamais réussi à trouver le moyen de confondre un meneur, un chef, un cadre, l’un des cerveaux de cette mouvance. Étrangement, ces individus ne sont, en outre, jamais, absolument jamais, les victimes des tirs de la police, et ne perdent jamais une petite main sur le pavé ou un œil comme en ont perdu des dizaines de Gilets jaunes moins bien traités qu’un charnier de visons covidés.

Mais devant l’ignorance crasse et, il faut le reconnaître, de plus en plus profonde, des masses, le pouvoir, loin d’être inquiété par toutes les anomalies qui caractérisent la mouvance noire, joue avec l’opinion en se moquant d’elle. Ainsi, à la suite de l’avant-dernière manifestation parisienne contre la loi liberticide Sécurité Globale, la police ne trouva pas meilleure idée que d’appréhender une femme certainement grand-mère, présente depuis des années à visage découvert dans les manifestations de protestation sociale pour la présenter aux yeux d’un public abruti comme l’un des chefs du Black Bloc !

Attention, apprenait-on de la bouche d’un policier bien comme il faut, la petite dame, stratège génial, génétiquement napoléonienne, 210 de QI, déployait son parapluie arc-en-ciel pour signaler aux barbares en noir qu’il était temps d’agir au même moment pour optimiser les dégâts urbains ! Après 20 ans d’agitation Black Bloc, la République avait enfin découvert le cerveau redoutable d’une mouvance insaisissable. (Cette femme, surnommée «Moun» et âgée d’une cinquantaine d’années, a été présentée le 15 décembre à un juge d’instruction parisien après quarante-huit heures de garde à vue. Elle a été mise en examen pour «participation à un groupement formé en vue de préparer des violences ou des destructions ou dégradations et détention non autorisée d’armes de catégorie A», selon une source judiciaire, avant d’être placée sous contrôle judiciaire. Une source proche du dossier a expliqué que l’enquête vise à déterminer si cette femme a pu déclencher «les infractions commises à l’occasion de manifestations récentes» attribuées à des manifestants «black bloc», qui s’en prennent aux policiers et aux symboles du capitalisme.)

Magnifique ! Dupont-Moretti en liesse ! Cette histoire n’était bien sûr, pour le Garde des sceaux, qu’une petite distraction qui a du faire glousser tous les « sachants », bref tous ceux qui n’ont pas besoin d’être complotistes pour savoir. Pour le reste, Dupont-Moretti a su rebondir. Afin de répondre aux questions des manifestants honnêtes et des politiques jouant le jeu, le premier justicier de la République entend désormais judiciariser le problème. Une façon de dire que la Justice et la police se donneront toujours plus le droit de surveiller, d’enquêter, de convoquer, d’immobiliser toute personne qui déplaira à la République. Sera Black Bloc tout individu que le pouvoir entendra neutraliser. Ou l’on voit que la barbarie des insaisissables Black Blocs d’aujourd’hui servira à la fabrication d’un nouveau fichage permettant l’identification et le contrôle d’hommes et de femmes qui devront porter en quelque sorte l’étoile rouge à cinq branches de l’anarcho-bolchévique, combien même leurs propres idées politiques seraient éloignées à des années lumière du nihilisme libertaire.

Le Système fabrique une violence qu’elle entretient, qu’elle couve (ce n’est pas nouveau) pour, in fine, agir en amont contre de possibles violences insurrectionnelles, ou simplement contre l’émergence d’une contestation organisée qui sortirait, enfin, le mouvement Gilet jaune (au sens large) de son état de minorité anomique (sans identité, sans direction, sans chef non stipendié…).

Les Black Blocs sont nés il y a deux décennies. Pendant 10 ans, ils n’ont servi qu’à divertir la journaillerie aux ordres pendant les rencontres au sommet à Seattle, à Davos etc. Au milieu des années 2000 était interviewée par le très trouble Frédéric Taddéï une figure aguerrie de la mouvance Black Bloc que personne ou presque ne connaissait encore, Gaston Besson.

Aujourd’hui beaucoup de gens connaissent Gaston Besson qui a écrit entre temps une sorte d’autobiographie dans laquelle on apprend qu’il fut mercenaire en Croatie, plutôt de droite voire d’extrême-droite. Dernièrement, « en ayant eu marre de tuer des gens », il forma des jeunes hommes pour combattre en Ukraine. Gaston Besson fait bien ce qu’il veut, il doit avoir la fibre aventurière. Mais, enfin, cette anecdote confirme l’évidence qui saute aux yeux. Les Black Blocs sont bel et bien, encadrés, dirigés, par des professionnels (souvent d’anciens militaires) qui ne partagent pas vraiment une idéologie anarchiste ou communiste.

Rémi Daillet Wiedemann état profond
Gaston Besson avec son parrain Jean-Marie Le Pen
L’idéologie, mobile au service d’opérations de nettoyage ?

Le Black Bloc n’est cependant pas le seul mouvement nébuleux d’extrême-gauche ou d’ultra-gauche servant les intérêts du Pouvoir ou de puissances qui ne sont nullement liées au communisme ou à l’anarchisme. Nous rappelons d’Action Directe, groupe terroriste qui aura liquidé officiellement, dans un geste révolutionnaire, tel grand patron ou tel général qui dérangeaient les intérêts de certaines entités ou de certaines officines.

Récemment, nous pouvons nous interroger sur les raisons pour lesquelles une mystérieuse mouvance anarchiste invisible s’est déchaînée à Grenoble, en 2017, avec pour point d’orgue de ses attaques, la destruction d’un garage avec pas moins de 50 véhicules de police et, surtout, d’un local où se trouvaient des scellés et d’autres preuves à conviction. Dont de nombreuses pièces à conviction liées à l’épouvantable assassinat de la petite Maelys. Après avoir nié dans un premier temps la destruction de ces pièces, le procureur devait se résoudre deux jours plus tard à reconnaître publiquement que ces dernières avaient bel et bien été brûlées ! Des pièces pas très importantes, disait-on, mais dont la destruction aura « ralenti le travail des enquêteurs ». Un dégât collatéral du combat anarchiste ? Vraiment ?

François-Xavier Rochette.

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